samedi 28 février 2009

La marque du vampire: Romeo y Julieta de Jakuta Alikavazovic

Romeo y Julieta n'est ni un remake de la pièce de Shakespeare, ni une analyse, ni un hommage à celle-ci.
Il faudrait plutôt y voir un nom de code, à associer au sous-titre(Un cratère) qui contient le secret de la nouvelle de Jakuta Alikavazovic.
Un indice: cette nouvelle fait partie d'un coffret, paru le 28 novembre dernier, aux éditions de l'Atelier in8, dont le thème est "Des plumes et du goudron".


Véra (prénom dont on peut se demander s'il ne s'agit pas d'un hommage dissimulé à la nouvelle homonyme de Villiers de l'Isla-Adam) et Jérémie sont deux fumeurs invétérés qui se sont rencontrés sur leur lieu de travail. Depuis qu'elle a tracé un trait sur la cigarette, Jérémie a l'impression que le lien profond qui les unissait s'est rompu, comme si le tabac était l'un des ingrédients nécessaires à leur alchimie amoureuse.

Lui gagne sa vie en débusquant les artistes qui plagient les idées de leurs pairs.
Elle, une écrivain qui se plaît à recréer dans sa vie les scènes des films fantastiques qui ont marqué ses esprits.
Derrière ses reproductions occultes, se cache un toxicomane dénommé Lucian. Les cinéphiles qui connaissent l'oeuvre de Jacques Tourneur ne pourront s'empêcher de frémir à l'évocation de l'une de ses plus fameuses scènes qu'il a réalisées.
Jérémie, dont la profession est pourtant de disséquer les oeuvres d'art, ne parvient pas à déchiffrer l'histoire que recèle l'étrange cicatrice au dos de Véra. Cette incapacité se solde par une jalousie croissante. Il voit en lui le vampire qui a pris possession de son corps, et de son sang.


Jakuta Alikavazovic, auteur méconnue d'un recueil de nouvelles en 2006(histoires contre nature) et d'un roman en 2007(Corps volatils qui a obtenu la bourse Goncourt du premier roman) aux éditions de l'olivier, nous propose ici une nouvelle d'une grande densité. On parle trop peu des nouvelles, souvent délaissées à l'ombre des librairies. Alors, pourquoi bouder notre plaisir quand celle-ci est délectable? En effet, de cette petite vingtaine de pages, émane une odeur de tabac cubain, un parfum de mystère qui ne laissera pas les cinéphiles indifférents. Les senteurs en sont rehaussées par des références subtilement intégrées au récit.




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